La loi

Le droit français a proclamé la liberté de l’enseignement, et le Conseil Constitutionnel l’a élevée au rang de principe fondamental reconnu par les lois de la République dès 1977 ; il est aussi consacré par plusieurs traités internationaux :

  • La Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1948, rappelle le droit des parents à choisir l’éducation de leur(s) enfant(s), dans son article 26 : « Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d’éducation à donner à leurs enfants. »
  • L’article 2 du Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme de 1952 impose aux Etats de respecter le droit des parents à assurer l’éducation de leurs enfants et à choisir un enseignement respectueux de leurs convictions religieuses et philosophiques. 
  • L’article 14 de la Charte de l’Union européenne protège « le droit des parents d’assurer l’éducation et l’enseignement de leurs enfants conformément à leurs convictions religieuses, philosophiques et pédagogiques« .
  • Le 23 novembre 1977, dans sa décision 77-87 DC, le Conseil Constitutionnel affirme que « La liberté d’enseignement constitue l’un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, ayant donc valeur constitutionnelle. »

La liberté de l’enseignement est donc un droit fondamental, qui fonde directement, pour les parents, la possibilité de choisir le type d’instruction qu’ils veulent donner à leur enfant. Pourtant, depuis 1998, l’instruction en famille est devenue un mode d’instruction très encadré…

Historique

1998

Le décès d’un enfant âgé de 19 mois, qui n’est donc pas encore en âge d’être scolarisé, va servir de référence aux différents rapports qui seront déposés au Sénat et à l’Assemblée nationale avant l’adoption de la loi n°98-1165 du 18 décembre 1998 sur le renforcement de l’obligation scolaire :

  • L’enseignement se fait « prioritairement dans les établissements d’enseignement ».
  • Une déclaration annuelle est exigée pour les familles choisissant l’IEF, et des contrôles obligatoires sont diligentés d’une part par la mairie tous les deux ans et d’autre part par l’inspection académique au moins une fois par an.
  • La loi prévoit des sanctions pénales à l’égard des familles qui contreviennent aux obligations de la loi.

2006

Création du Collectif Pour la Liberté d’Instruction (CPLI), qui s’inscrit dans une série d’actions conjointes pour lutter contre des propositions parlementaires liberticides faites en décembre 2006. Le CPLI obtient le retrait de deux amendements visant à supprimer l’instruction en famille.

2007

La loi sur la prévention de la délinquance, réformant la protection de l’enfance, a été adoptée le 22 février 2007.

  • Les familles qui scolarisent leurs enfants par le biais de l’enseignement à distance sont désormais soumises à l’enquête de la mairie au même titre que les familles en IEF.
  • L’instruction à domicile est limitée aux seuls enfants d’une même famille.

2009

Les enfants instruits dans la famille sont désormais soumis à la maîtrise du socle commun de connaissances et de compétences, adopté en 2005 et rédigé à l’origine exclusivement pour les enfants scolarisés dans les établissements publics ou privés sous contrat.

2019

La loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance est adoptée :

  • L’instruction obligatoire commence désormais à partir de 3 ans et une obligation de formation est imposée de 16 à 18 ans
  • Bien que le contrôle ait lieu « en priorité au domicile », c’est l’autorité administrative qui fixe les modalités du contrôle.
  • Suite à une mise en demeure, un enfant devra rester scolarisé au moins jusqu’à la fin de l’année scolaire suivant celle où la mise en demeure a été prononcée.

2021

La loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République restreint drastiquement la liberté éducative :

  • L’instruction en famille est soumise à autorisation, selon 4 motifs définis
  • Une instance départementale chargée de la prévention de l’évitement scolaire est mise en place.

Cadre juridique

La loi qui s’applique à l’instruction en famille se trouve dans le code de l’éducation, articles L.131-1 et suivants

Obligation d'instruction

Autorisation d'instruction en famille

Article L131-5 :

Les personnes responsables d’un enfant soumis à l’obligation scolaire définie à l’article L. 131-1 doivent le faire inscrire dans un établissement d’enseignement public ou privé ou bien, à condition d’y avoir été autorisées par l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation, lui donner l’instruction en famille.
Les mêmes formalités doivent être accomplies dans les huit jours qui suivent tout changement de résidence.
La présente obligation s’applique à compter de la rentrée scolaire de l’année civile où l’enfant atteint l’âge de trois ans.
L’autorisation mentionnée au premier alinéa est accordée pour les motifs suivants, sans que puissent être invoquées d’autres raisons que l’intérêt supérieur de l’enfant :

    1. L’état de santé de l’enfant ou son handicap ;
    2. La pratique d’activités sportives ou artistiques intensives ;
    3. L’itinérance de la famille en France ou l’éloignement géographique de tout établissement scolaire public ;
    4. L’existence d’une situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif, sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d’instruire l’enfant à assurer l’instruction en famille dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant. Dans ce cas, la demande d’autorisation comporte une présentation écrite du projet éducatif, l’engagement d’assurer cette instruction majoritairement en langue française ainsi que les pièces justifiant de la capacité à assurer l’instruction en famille.

L’autorisation mentionnée au premier alinéa est accordée pour une durée qui ne peut excéder l’année scolaire. Elle peut être accordée pour une durée supérieure lorsqu’elle est justifiée par l’un des motifs prévus au 1°. Un décret en Conseil d’Etat précise les modalités de délivrance de cette autorisation.
L’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation peut convoquer l’enfant, ses responsables et, le cas échéant, les personnes chargées d’instruire l’enfant à un entretien afin d’apprécier la situation de l’enfant et de sa famille et de vérifier leur capacité à assurer l’instruction en famille.

En application de l’article L. 231-1 du code des relations entre le public et l’administration, le silence gardé pendant deux mois par l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation sur une demande d’autorisation formulée en application du premier alinéa du présent article vaut décision d’acceptation.
La décision de refus d’autorisation fait l’objet d’un recours administratif préalable auprès d’une commission présidée par le recteur d’académie, dans des conditions fixées par décret.
Le président du conseil départemental et le maire de la commune de résidence de l’enfant sont informés de la délivrance de l’autorisation. Lorsqu’un enfant recevant l’instruction dans la famille ou l’un des enfants du même foyer fait l’objet de l’information préoccupante prévue à l’article L. 226-3 du code de l’action sociale et des familles, le président du conseil départemental en informe l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation, qui peut alors suspendre ou abroger l’autorisation qui a été délivrée aux personnes responsables de l’enfant. Dans cette hypothèse, ces dernières sont mises en demeure de l’inscrire dans un établissement d’enseignement scolaire, dans les conditions et selon les modalités prévues à l’article L. 131-5-1 du présent code.
Lorsque, après concertation avec le directeur de l’établissement d’enseignement public ou privé dans lequel est inscrit un enfant, il est établi que l’intégrité physique ou morale de cet enfant est menacée, les personnes responsables de l’enfant peuvent lui donner l’instruction dans la famille après avoir sollicité l’autorisation mentionnée au premier alinéa du présent article, dans le délai restant à courir avant que cette autorisation ne leur soit accordée ou refusée.
L’enfant instruit dans la famille est rattaché administrativement à une circonscription d’enseignement du premier degré ou à un établissement d’enseignement scolaire public désigné par l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation.

Partie réglementaire sur les demandes d’autorisation : Code de l’éducation, articles R131-11 à R131-11-13.

Prévention de l'évitement scolaire

Contrôles

Article L131-10 :

Les enfants soumis à l’obligation scolaire qui reçoivent l’instruction dans leur famille, y compris dans le cadre d’une inscription dans un établissement d’enseignement à distance, sont dès la première année, et tous les deux ans, l’objet d’une enquête de la mairie compétente, uniquement aux fins de vérifier la réalité des motifs avancés par les personnes responsables de l’enfant pour obtenir l’autorisation mentionnée à l’article L. 131-5, et s’il leur est donné une instruction dans la mesure compatible avec leur état de santé et les conditions de vie de la famille. Dans le cadre de cette enquête, une attestation de suivi médical est fournie par les personnes responsables de l’enfant. Le résultat de cette enquête est communiqué à l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation et aux personnes responsables de l’enfant.

Lorsque l’enquête n’a pas été effectuée, elle est diligentée par le représentant de l’Etat dans le département.

L’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation doit au moins une fois par an, à partir du troisième mois suivant la délivrance de l’autorisation prévue au premier alinéa de l’article L. 131-5, faire vérifier, d’une part, que l’instruction dispensée au même domicile l’est pour les enfants d’une seule famille et, d’autre part, que l’enseignement assuré est conforme au droit de l’enfant à l’instruction tel que défini à l’article L. 131-1-1. A cet effet, ce contrôle permet de s’assurer de l’acquisition progressive par l’enfant de chacun des domaines du socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l’article L. 122-1-1 au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d’enseignement de la scolarité obligatoire. Il est adapté à l’âge de l’enfant et, lorsqu’il présente un handicap ou un trouble de santé invalidant, à ses besoins particuliers.

Le contrôle est prescrit par l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation selon des modalités qu’elle détermine. Il est organisé en principe au domicile où l’enfant est instruit. Les personnes responsables de l’enfant sont informées, à la suite de l’autorisation qui leur est accordée en application du premier alinéa de l’article L. 131-5, de l’objet et des modalités des contrôles qui seront conduits en application du présent article.

Les résultats du contrôle sont notifiés aux personnes responsables de l’enfant. Lorsque ces résultats sont jugés insuffisants, les personnes responsables de l’enfant sont informées du délai au terme duquel un second contrôle est prévu et des insuffisances de l’enseignement dispensé auxquelles il convient de remédier. Elles sont également avisées des sanctions dont elles peuvent faire l’objet, au terme de la procédure, en application du premier alinéa de l’article 227-17-1 du code pénal.

Si les résultats du second contrôle sont jugés insuffisants, l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation met en demeure les personnes responsables de l’enfant de l’inscrire, dans les quinze jours suivant la notification de cette mise en demeure, dans un établissement d’enseignement scolaire public ou privé et de faire aussitôt connaître au maire, qui en informe l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation, l’école ou l’établissement qu’elles auront choisi. Les personnes responsables ainsi mises en demeure sont tenues de scolariser l’enfant dans un établissement d’enseignement scolaire public ou privé au moins jusqu’à la fin de l’année scolaire suivant celle au cours de laquelle la mise en demeure leur a été notifiée.

Lorsque les personnes responsables de l’enfant ont refusé, sans motif légitime, de soumettre leur enfant au contrôle annuel prévu au troisième alinéa du présent article, elles sont informées qu’en cas de second refus, sans motif légitime, l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation est en droit de les mettre en demeure d’inscrire leur enfant dans un établissement d’enseignement scolaire public ou privé dans les conditions et selon les modalités prévues au sixième alinéa. Elles sont également avisées des sanctions dont elles peuvent faire l’objet, au terme de la procédure, en application du premier alinéa de l’article 227-17-1 du code pénal.

Un décret en Conseil d’Etat fixe les modalités d’application du présent article.

Partie réglementaire sur les contrôles : Code de l’éducation, articles R131-2 à R131-16-4.

Sanctions

Article L131-11 :

Les manquements aux obligations résultant des articles L. 131-5-1, L. 131-10 et L. 442-2 du présent code sont sanctionnés par les dispositions des articles 227-17-1 et 227-17-2 du code pénal, ci-après reproduites :

« Art. 227-17-1.-Le fait, par les parents d’un enfant ou toute personne exerçant à son égard l’autorité parentale ou une autorité de fait de façon continue, de ne pas l’inscrire dans un établissement d’enseignement, sans excuse valable, en dépit d’une mise en demeure de l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation, est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende ».

Nota :
Conformément à la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-710 QPC du 1er juin 2018, le second alinéa de l’article 227-17-1 du code pénal, dans sa rédaction résultant du décret n° 2012-16 du 5 janvier 2012 relatif à l’organisation académique, est conforme à la Constitution sous les réserves suivantes : pour que les dispositions contestées satisfassent au principe de légalité des délits et des peines, la mise en demeure adressée au directeur de l’établissement doit exposer de manière précise et circonstanciée les mesures nécessaires pour que l’enseignement dispensé soit mis en conformité avec l’objet de l’instruction obligatoire.

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