L'IEF dans le monde

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L’instruction en famille est illégale en Allemagne, mais chaque “land” est plus ou moins tolérant envers les familles qui tentent d’instruire en famille.
L’instruction en famille est possible dans certaines conditions : s’il est prouvé que l’enfant est psychologiquement inapte à aller à l’école, si la famille est itinérante…
Même si les familles arrivent à instruire en famille, elles doivent souvent payer des amendes au département de l’éducation pour absentéisme scolaire.
Malgré tout un bon nombre de familles arrivent à instruire en famille, sous le radar.

L’instruction en famille en Allemagne – Matthias Kern (traduction d’Estelle Benadjaoud) – Août 2013

S’il est vrai que dans l’ensemble la situation allemande concernant l’instruction en famille peut s’expliquer simplement – c’est illégal – il n’en reste pas moins qu’en y regardant de plus près, les choses se compliquent. La République Fédérale d’Allemagne est constituée de 16 Länder (États). Le gouvernement fédéral n’a pas le pouvoir de légiférer en matière d’éducation, il y a donc 16 législations différentes correspondant à chacun des Länder, mais il y a peu de variations entre elles. La fréquentation de l’école est obligatoire pour les enfants de 6 à 16 ans au moins (parfois 18 ans selon les circonstances et les Länder). Ceci est souvent interprété comme une obligation d’enseignement en présentiel au sein d’un établissement, sans possibilité d’enseignement à distance ou à domicile. Bien que la plupart des réglementations propres à chaque Land (État) prévoie des exemptions, aucune n’est accordée.

Il incombe aux parents d’inscrire leur enfant dans un établissement (public ou privé sous contrat) et d’en garantir l’assiduité. Les adolescents (âgés de 14 à 17 ans) partagent également cette responsabilité avec leurs parents.

Dans la plupart des États, tout manquement aux dispositions prévues par la loi par les parents et/ou l’adolescent constitue une infraction administrative passible d’une amende pouvant atteindre 1000 € (parfois plus dans certains Länder). Concrètement, les amendes peuvent varier d’un montant unique de 50 € à des demandes de paiement répétées allant jusqu’à 1000 € (par exemple, une première amende suivie d’une autre 6 mois plus tard). Dans certains États, si vous refusez de vous soumettre à une injonction de paiement, une peine de détention pour insoumission peut être prononcée pour vous inciter à payer. Pour faire appliquer la loi ultérieurement (après une date butoir par exemple), l’État peut exiger comme mesure coercitive le paiement de plusieurs milliers d’euros (et ce à répétition). Dans certains États, soustraire son enfant à l’obligation scolaire est passible soit d’une amende plus importante (calculée selon vos revenus), soit d’une peine allant jusqu’à 6 mois d’emprisonnement. De plus, ne pas fréquenter un établissement scolaire est considéré comme une atteinte au bien-être de l’enfant et une mise en danger de ce dernier qui peut aboutir au retrait partiel ou total du droit de garde. En dernier recours, l’enfant peut être retiré de sa famille et placé en famille d’accueil ou en foyer.

Dans certains cas (particulièrement pour les adolescents), le refus d’aller à l’école peut être considéré comme « une phobie scolaire » et les jeunes gens sont internés en hôpital psychiatrique.

Malgré tout, en Allemagne, des familles instruisent leurs enfants à domicile et des enfants refusent d’aller à l’école. Leur nombre est incertain, les estimations allant de plusieurs centaines à plusieurs milliers. Certaines familles vivent cachées (elles ne sont pas connues des autorités), d’autres sont domiciliées dans un pays différent mais vivent en Allemagne pendant au moins une partie de l’année, certaines familles décident d’aller à l’étranger pendant quelques années ou de façon définitive, d’autres sont tolérées de manière plus ou moins tacite par les autorités locales, dans certains cas, les pouvoirs publics semblent abandonner les poursuites après plusieurs tentatives et laissent les familles tranquilles – et quelques familles ont des démêlés constants avec l’administration et la justice.

Les examens et certificats sanctionnant un niveau d’étude ne posent eux pas de problèmes puisqu’il est toujours possible de les obtenir en candidat libre.

Plusieurs associations d’instruction en famille existent (par exemple, “Bundesverband Natürlich Lernen!”, “Netzwerk Bildungsfreiheit“), des rencontres et rassemblements nationaux ont lieu, on peut même assister à des réunions et des rencontres locales (voir www.leben-ohne-schule.de). Il existe aussi une association regroupant des jeunes gens ayant été instruits en famille (“Septré”).

En 2012, la “Freilerner-Solidargemeinschaft e.V.” (une association de soutien aux familles instruisant à domicile) a été créée. Elle a pour but d’aider par tous les moyens possibles les familles instruisant leurs enfants à domicile et les jeunes gens refusant l’école, par exemple en relayant des informations générales, en leur offrant un soutien moral, en les dirigeant vers des avocats expérimentés, en les accompagnant à des entretiens avec les autorités ou devant les tribunaux et, enfin et surtout, en rassemblant des fonds pour les aider à payer les amendes et les honoraires d’avocats, etc.

Comment cette association décide-t-elle du soutien accordé aux familles, et sur quels critères ?  – (traduction de Pom) – septembre 2013

« Freilerner-Solidargemeinschaft » est une association enregistrée qui est composée d’un bureau élu (3 personnes à ce jour) et qui a officiellement (et donc pratiquement) la possibilité de prendre des décisions ultimes au regard d’aides financières aux familles. Il ne le fera qu’après avoir consulté les membres actifs de l’association et cherchera de préférence à trouver le consensus.

Pour de nombreuses raisons c’est une association distincte, qui a pour principal objectif de soutenir les familles en conflit avec les autorités. Alors, contrairement aux autres associations, comme par exemple BVNL ou LED’A *, [qui promeuvent l’IEF de manière plus globale] « Freilerner-Solidargemeinschaft » a relativement peu de membres actifs votants et un nombre plus élevé de membres donateurs, ainsi le consensus entre les membres actifs est en général possible.

Mais cela dépend essentiellement des circonstances. Par exemple il arrive que des familles aient besoin urgemment d’argent (ou au moins de la promesse d’obtenir une certaine somme) avant de consulter un avocat et cela peut être décidé par le bureau seul.

Quant aux critères, l’objectif principal de Freilerner-Solidargemeinschaft sont les Droits de l’enfant et leur autonomie. Par conséquent l’association soutient toutes les familles qui respectent ces droits. Si il y a des doutes à ce sujet, le cas est débattu. Jusqu’à présent nous n’avons pas rencontré de difficulté. Nous avions des contacts étroits avec les familles demandeuses de soutien financier et le consensus était là.

*NDLT : LED’A , par l’intermédiaire de son service juridique, assure aussi la défense des familles qui rencontrent des difficultés avec les autorités.

Commentaire sur l’historique de la scolarité obligatoire en Allemagne – Matthias Kern (traduction d’Estelle Benadjaoud)

On entend souvent dire que l’école a été rendue obligatoire sous Hitler et/ou que cela n’a pas changé depuis cette période. D’abord, ces affirmations forment une description trop simpliste, et sont, de par leur simplicité, fausses (voir ci-dessous).

Ensuite, ces allégations ne permettront pas selon moi de faire évoluer la situation allemande. L’Autobahn (autoroute) a été construite sous Hitler. Et alors ? Quelle qu’en soit l’origine, l’école obligatoire (et les réglementations qui la régissent) enfreint les droits des personnes concernées – aujourd’hui – et doit donc être réformée. Débattre de son origine occasionne des discussions et des controverses qui, bien qu’intéressantes sur le plan historique, ne font qu’éloigner le débat de la question centrale qui reste la situation actuelle et le besoin de changement.

De plus, accuser les représentants de l’État de faire respecter une loi nazie sera habituellement perçu comme une provocation et ne favorisera pas un climat de sympathie ou des chances d’obtenir un compromis. Cela dit, pour mémoire, voici les faits historiques (à ma connaissance) :

Les lois concernant la scolarité obligatoire (« Schulpflicht ») ont été introduites bien avant l’époque nazie. Une loi a par exemple été votée par la première République d’Allemagne en 1919 (d’autres lois concernant d’autres parties de l’Allemagne sont encore plus anciennes). Mais les exemptions étaient encore possibles, pas dans les textes mais en pratique. C’est ce que les nazis ont changé – plus d’exceptions possibles (pour être exact, cela ne concernait qu’une partie de la population, d’autres n’avaient pas le droit d’aller à l’école). Et ce sont les nazis qui sont à l’origine d’une loi donnant le droit à la police d’emmener les enfants de force à l’école (« Schulzwang »). Après la seconde guerre mondiale, cette loi fut invalidée (l’éducation devenant la responsabilité de chaque État (Land) et non plus celle du gouvernement fédéral). Chacun des États (au nombre de 16 à présent) s’est doté de sa propre législation en matière d’éducation et de scolarité. Malheureusement, les principes de « Schulpflicht » et de « Schulzwang » ont été maintenus dans toutes les nouvelles lois (parfois textuellement) même parmi les cinq États qui n’ont rejoint la République Fédérale qu’en 1990.

Mais comme je l’ai dit plus haut, je ne pense pas que discuter de ces faits historiques puisse aider (ou qu’ils aient un quelconque rapport avec) la situation actuelle.

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